Un livre de Dominique BLATTLIN (2014 - France)
52 promenades à travers 52 films dans le hall du cinéma PALLADIUM à Avignon, comme un sas symbolique entre la rue et la salle, entre le quotidien et le rêve.
Album Cartonné Format 25 x 19 cm 132 pages Texte Français |
Le Palladium d’Avignon fut inauguré le 1er septembre 1928 par Messieurs J. Bègue et T. Barbery.
Deux directeurs pour une salle résolument moderne, érigée au 55 rue de la République, en centre ville, à mi-chemin du Rhône, du Palais des Papes et de la gare. L’enjeu est de taille, Avignon étant largement déficitaire de lieux adaptées pour un divertissement issu des baraques foraines : le cinématographe. Ces deux notables y croient, tout en sachant que financièrement l’époque est incertaine, mais les spectateurs potentiels avides de rêves et de sensations nouvelles. Bientôt les ombres de l’écran vont se mettre à parler et ignorer le pianiste et le commentateur pour ceux qui ne sont pas en mesure de lire les intertitres. Période charnière, hésitant encore entre music-hall et invention technique permettant une création « artistique », bizarrerie ondoyée depuis peu comme un art se séparant de ses cousins de chair : théâtre et mime.
Les Directeurs du Palladium proposent quotidiennement des attractions sur scène, des actualités et des films de première partie, puis le long-métrage d’abord muet et rapidement sonore et parlant. Le monde est en marche, Avignon n’a plus rien à envier aux grandes salles de Marseille ou de la Capitale. L’accueil, le bar et la salle feront oublier les improbables « tourneurs de manivelle » officiant dans des granges et des arrière-salles de café. Les plus grandes vedettes du moment se partagent l’affiche, la projection de leurs péripéties, leur existence fictionnelle se déroule dans un environnement cosy, Art Déco, bourgeoisement provincial.
"M LE MAUDIT", le film le plus troublant vu à ce jour, pour adultes seulement !
Bientôt, un monde bascule avec la montée du nazisme et se délite puis renaît lors de la Libération de la France. Avec les années 50 et 60, les imitateurs, jongleurs, prestidigitateurs, acrobates et autres fantaisistes de l’entracte disparaîtront et retourneront aux cirques et aux cabarets et les actualités de première partie, obsolètes, remplacées par le journal télévisé de la RTF. Puis les films de première partie seront, à leur tour, sacrifiés quand n’existera plus que la rentabilité et le profit. Les grandes salles, à l’aune des années 70, bientôt fragmentées en trois écrans et l’exclusivité immédiate sur tout l’hexagone. Subsistent alors uniquement films-annonce et publicité avant le grand film. Le temps est quantifié et le plus grand nombre de séances nécessaires pour vaincre la concurrence télévisuelle. La magie, l’apparat, l’éclat particulier d’antan ont disparu, définitivement.
Le bar, au 1er étage
Mais revenons début des années 30, en un flash-back nostalgique. Le hall du Palladium et ses artifices : présentoirs, affiches, aguiche le quidam curieux, promeneur impénitent en mal de distractions, le conviant à devenir spectateur de ses propres rêves et phantasmes. Grâce à cette invention du diable, donnant une immortalité gestuelle et éternelle au commun des mortels, le passant deviendra autre, lui aussi responsable et gardien d’une réalité hier diffuse, vouée à l’oubli, et désormais sauvegardée. Merci Messieurs Bègue et Barbery d’avoir organisé ce sas entre la rue et salle, créant une magie de l’envie et de l’attente, merci d’avoir été les bateleurs involontaires d’une atmosphère, d’un désir.
EN SAVOIR PLUS
Télécharger un extrait > (pdf)
Album Cartonné Format 25 x 19 cm 132 pages Texte Français |